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Terroir remixé, masculinités réinventées

Faire rimer terroir et identités avec croisements et renouvellement, une gageure ? Pour l’ouverture du festival Quartiers Danses, les basques espagnols de Kukai Dantza, qui puisent leur inspiration dans les danses traditionnelles, se démarquent par deux extraordinaires pièces. Créées par des chorégraphes catalans invités à renouveler le langage de la compagnie, celles-ci ne font pas que réinterpréter les traditions, elles livrent une vision plurielle et réinventée de la masculinité.
Egilea
Nayla Naoufal
Komunikabidea
Le devoir
Mota
Albistea
Data
2015/09/14
Lotura
Le devoir

Éternel masculin

Quatre malabars à l’oeil ténébreux, en jeans serrés, chemises, espadrilles et blouson de cuir. Arborant une barbe de trois jours, ils roulent des mécaniques. Quatre mâles alpha ? Deux d’entre eux s’empoignent, se repoussent au moyen de mouvements amples des bras, tranchant l’air telle une fronde. Chassé-croisé vigoureux, ponctué par une musique électronique énergisante et par des gestes voulus virils : remise en place des blousons d’un haussement d’épaules, regards de défi, déhanchements à la John Wayne…

Cette gestuelle ancrée dans les clichés corporels masculins est métissée de petits mouvements des pieds, des chassés, des sauts, évoquant les danses traditionnelles. S’y mêlent des virevoltes lyriques, des jambes qui battent haut, d’impressionnants tours fouettés, une vigoureuse gestuelle contemporaine, des entrechats… Dans Sorbatza, conçue par Damián Muñoz et Virginia García de la compagnie la Intrusa Danza, le langage chorégraphique est remarquablement exaltant et inventif. Interprété avec une très grande virtuosité par des hommes magnifiques et charismatiques, il ne se réduit pas pour autant à de la technicité puissante, mais est empli de fantaisie et d’imagination. Partie de boxe qui se transforme en toute autre chose, danseur penché et suspendu par ses comparses tel un pierrot émouvant qui jouerait au dur…

On pense à West Side Story, à James Dean, à une «battle» de hip-hop, à des loubards qui veulent être des rockeurs… Surtout, on est réjouis par cette intelligence du métissage, et par cette manière qu’ont les danseurs — parmi eux figure le chorégraphe de Kukai Dantza, Jon Maya, qui se contente ici d’être interprète — de jouer des codes de la masculinité, par ce deuxième degré et par cette ironie bon enfant.

Ronde basque plurielle

Changement d’ambiance dans Gelajauziak (fragments), créée pour Kukai Dantza par le Catalan Cesc Gelabert. On retrouve les interprètes de Sorbatza, vêtus de vêtements rappelant davantage le terroir : une jupe rouge pour l’un, un pantalon écarlate et un béret noir pour l’autre… En particulier, leur posture est différente : ils ont abandonné le côté malabar viril.

Au son d’une musique traditionnelle, ils se lancent dans une ronde ludique. Petits pas croisés, ronds de jambes, tours et volte-face rythmées par des déclamations en basque. Peu à peu, la ronde se défait, devient moins disciplinée et plus acrobatique.

D’électrons libres, les danseurs se regroupent ensuite dans le centre du plateau, construisant une sculpture de corps éclairée par un projecteur… La trame sonore alterne avec une musique électroacoustique galvanisante et un beau « spoken word » sur fond de musique. Progressivement, la gestuelle, toujours nourrie par le patrimoine basque, devient une écriture de l’envolée, se faisant plus contemporaine et plus puissante.

Ce double programme a ceci de passionnant qu’il présente deux pièces très différentes, animées par la même volonté de questionner le langage chorégraphique du patrimoine basque. Nous sont donnés à voir deux regards sur la relecture des traditions, mais mille regards sur les identités culturelles et masculines. Les danseurs, Eneko Gil, Jon Maya, Ibon Huarte et Alain Maya, sont forts et fragiles, doux et durs, traditionnels et iconoclates, graciles et robustes… À l’aide d’une scénographie toute simple et brillante, cette très aboutie soirée basque est un hommage à la diversité et à la pluralité, dont on a bien besoin par les temps qui courent.

Sorbatza: De Damián Muñoz, Virginia García et Kukai Dantza

Suivi de Gelajauziak (fragments) De Cesc Gelabert et Kukai Dantza

Maison Théâtre, le 11 septembre à 20h

<em>Gelajauziak (fragments)</em> de Cesc Gelabert et Kukai Dantza

Photo: Bostok Gelajauziak (fragments) de Cesc Gelabert et Kukai Dantza

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