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" Je danse bien sûr, mais je parle et j'expose ma manière de voir "

Egilea
Jean Sébastien Mora
Komunikabidea
Le Journal du Pays Basque
Mota
Elkarrizketa
Data
2008/10/31

Parmi elles la Compagnie Pape Ibrahima Ndiaye dit Kaolack du Sénégal. Ce jeune danseur de 27 ans qui dansera ce soir en solo, tient son nom de la ville de Kaolack, une ville dont l'eau polluée a teinté en marron les dents de ses habitants.

Qu'elle a été votre rencontre avec la danse ?

J'ai commencé à danser en 2001, à l'époque je vivais dans une banlieue de Dakar. J'ai fait la connaissance de Germaine Acogny, qui a été très proche de Maurice Béjart et qui a fondé l'école «Mudra Afrique» à Dakar en 1977. C'est elle qui m'a donné mon nom de scène, Kaolack.

Le nom du spectacle est «J'accuse», on dit de vous que vous êtes un danseur engagé ?

Oui, je suis en résistance, j'ai souhaité que mon spectacle soit quelque chose de personnel. Je danse bien sûr, mais je parle et j'expose ma manière de voir.

Je cherche à dénoncer la situation et les enjeux politiques très durs que nous vivons, nous les Africains. A commencer par moi, en tant qu'artiste africain, il est parfois très dur d'obtenir un visa pour l'Europe.

Cette difficulté nous amène à perdre des dates. J'ai même passé deux jours en prison au Maroc : arrivé là-bas, les autorités ont cru que mon passeport était faux. Il y a des fortes pressions des pays européens contre les pays du Magreb afin de contenir l'immigration de l'Afrique noire.

Pourtant l'immigration africaine est légitime, le néocolonialisme et la politique française en Afrique sont responsables de la situation très difficile dans laquelle nous sommes aujourd'hui. L'armée française est toujours là, les entreprises européennes exploitent nos ressources et placent à la tête des gouvernements des imbéciles, qui ne pense qu'à remplir leur compte en Suisse.

Tant que les dirigeants européens ne laissent pas les pays africains autonomes, maîtres de leurs destins politique et économique, nous tenterons d'aller en Europe ou aux Etats-Unis. Les Africains nous revendiquons le fait de vivre dignement chez nous.

Le pire c'est qu'aujourd'hui, les Chinois arrivent également sur le continent, à l'image des Européens, ils vendent des armes et ils exploitent les ressources.

Leurs techniques de pêche par exemple sont désastreuses et ont vidé de poissons l'océan au niveau du Sénégal. Aujourd'hui les pécheurs sénégalais risquent leurs vies en péchant illégalement en Mauritanie. Après la Françafrique, maintenant c'est la Chinafrique !!

Et la danse, en quoi est-elle engagée ?

J'ai une manière personnelle d'appréhender la danse, je parle, je sors de scène. J'ai surtout conscience que c'est un cadeau inestimable de s'exprimer, de se faire voir. Je donne le maximum de moi-même.

Je viens de la rue, malgré dans ce contexte très difficile, j'ai réussi à me construire. On m'a beaucoup donné et je fais tout pour donner aux autres. La danse m'a beaucoup apporté, je veux le partager. Je suis également intéressé par de nombreux domaines, la sculpture, les arts visuels, la création sous toutes ses formes. Ma manière d'aborder la scène est marquée par toutes ces influences. La liberté de création que j'ai, est très enrichissante pour moi.

Comment vous placez-vous d'un point de vue idéologique et culturel, vous êtes attiré par la politique ?

Je ne ferai jamais, jamais, de politique !! Je souhaite garder mon authenticité. Culturellement, je suis Soufi, un courant de l'islam mystique. Je ne crois pas en la lutte armée, elle a fait tellement de désastre là-bas. Je crois en une résistance et en la révolution passive.

Je me sens très proche idéologiquement de Thomas Sankara, dans la manière qu'il a eue d'unifier les Burkinabe. Il faut vraiment que les Africains s'unissent, même si les politiques occidentales visent à les diviser, «diviser pour mieux régner comme on dit».

L'unité des peuples africains c'est très important, nous sommes très inhibés, alors qu'il nous faudrait du courage.

A l'image de Steve Bicko, une des grandes figures de la lutte anti-apartheid, «Plutôt que de mourir à genoux, je préfère mourir debout, fier». En ce sens je me sens proche de Thomas Sankara, il se savait menacé, mais il a fait le choix idéologique de continuer à vivre chez lui, de renoncer au luxe du palais présidentiel.

En Afrique, aujourd'hui, avec le développement d'internet et «you tube», les jeunes sont de plus en plus conscients et intelligents. Nous regardons des documentaires sur les personnages et ces événements qui ont fait l'Histoire de l'Afrique.

J'ai acquis beaucoup de sagesse ces dernières années, il y a eu la danse mais les voyages y sont pour beaucoup.

Au cours de ces huit dernières années, j'ai beaucoup voyagé, la rencontre des différents peuples m'a enrichi. Pourquoi n'a-t-on pas la liberté de se déplacer, de partager avec les autres ?

Je me suis également rendu compte, qu'il y a de grosses différences culturelles entre les peuples en Europe. J'ai également pris conscience qu'il y a beaucoup de misère aux États-Unis, que les Africains ont une vision erronée de l'Occident. En ce sens, j'espère sincèrement qu'Obama gagnera les élections. Cela serait formidable !!

Ibrahima Ndiaye dit Kaolack à la gare du midi.

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